Longue attente pour le vol jusqu’à Cotonou, où je n’arrive qu’à une heure du matin. Mes quatre chevaliers servants sont là : Olivier, Modeste, Eugène et Prince ! Nous sommes heureux de nous retrouver. Ces quatre là sont dévoués, chaleureux, amicaux. C’est un bonheur !

Olivier m’a loué une chambre dans une sorte de monastère ! Une chambre très nue, mais remarquablement propre, dans laquelle je me sens pure comme une jeune nonne ! Enfin, bon… Façon de parler !

La matinée à Cotonou me rappelle bien des souvenirs, datant déjà de presque 2 mois. A la Maison de la Francophonie, la fédération a donné quelques jeux de Scrabble, et Eugène tient un club une fois par semaine pour une douzaine de jeunes novices. Tout le monde me remercie. La Directrice des Loisirs du Ministère de la Jeunesse, celle qui nous a laissés tomber, souhaiterait parait-il aussi me rencontrer. Un peu tard Madame, vous qui n’avez même pas pris la peine de vous rendre à la cérémonie de remise du matériel. Enfin, Edmond, le Président de la Fédération Béninoise a demandé lui aussi à avoir un entretien avec moi.

Edmond, fort absent durant le Rallye des mots, et plus encore durant sa préparation qu’il a complètement déléguée au vice-président avec lequel je me suis si mal entendue, comprend la réaction de mon départ, et un certain nombre de mes indignations. Edmond a bien compris ce qui s’était passé, apparemment. J’explique à nouveau : le Rallye des Mots n’était pas une opération de la fédé béninoise, la préparation a été nulle, les modes de management des scrabbleurs bénévoles qui se sont démenés pour que l’on arrive à quelque chose étaient choquants, etc. Désormais, les choses sont donc dites au plus haut niveau. J’exprime mon souhait enfin que des élections se déroulent sereinement en septembre pour la mise en place d’un nouveau bureau, compte tenu du bilan que l’on peut tirer de ce qui s’est passé. Voilà donc un point final mis à mon histoire béninoise. Le coup de pied dans la fourmilière semble avoir payé. Il faut maintenant attendre.

Olivier n’a toujours pas reçu le fameux virement qui lui permettrait de quitter Cotonou pour le Burkina avec les marchandises. Mon Dieu, que les choses sont compliquées ! Je me débrouille pour dégager suffisamment d’argent liquide pour que son départ soit possible demain, car il n’y a qu’un bus le mercredi.

Après la lecture de mes 25 mails quotidiens (!), auxquels je réponds d’ailleurs, nous pouvons partir vers le nord. Eugène, adorable nous a concocté des sandwichs avant le départ. Puis, nous voilà partis avec Modeste et Prince pour une route de plus de 400 kilomètres cet après-midi, en direction de Parakou, notre première halte.

Et c’est le spectacle à nouveau des routes béninoises. Bien meilleures que les routes camerounaises du point de vue de l’infrastructure comme de la conduite des automobilistes. Les femmes sont très belles ici. Grandes et minces, très élancées, on les voit sur les routes, les bras en arc de cercle au-dessus de la tête, maintenant en équilibre leur bassine cabossée en fer-blanc, dans laquelle elles transportent fièrement toutes sortes de marchandises. Un petit crabe noir est très souvent accroché derrière leur dos, solidement maintenu jambes écartées par un pagne coloré qui semble les écraser, tête de côté : c’est un bébé. Quand on regarde ces femmes de face, on remarque autour de leur taille deux ovales noirs minuscules : ce sont les pieds nus de l’enfant qu’elles portent !

Les paysages de cette route me sont connus : forêts de teck, collines granitiques, étals de gari (farine de manioc) très blanc le long des bas-côtés, stands d’ignames, et vente d’animaux rôtis que le vendeur présente en criant tout écartelés sur leur broche : ce sont des rats !! Délicieux paraît-il, comme le sont aussi les grillons en brochette, les serpents, les cafards, etc. Moi qui ne parviens pas même à avaler un peu de blanc de poulet, on se doute de l’effet que peuvent me faire de telles perspectives !

La route est très longue, mais Prince s’en sort bien. A la nuit, j’ai peur tout de même, de ces piétons noirs qui marchent dans le noir sur le bas-côté, de ces motocyclistes sans phares que l’on découvre à la toute dernière minute, de ces énormes camions qu’il faut doubler. Je dois me débrouiller dorénavant pour éviter de me retrouver ainsi de nuit sur la route.

A l’auberge de Parakou, j’arrive assez épuisée. Je ne parviens pas à avaler quoi que ce soit. Modeste et Prince que j’invite à dîner avec moi ont hâte eux aussi d’aller se reposer.